Sida : la France en état stationnaire
Manifestation à l'initiative des acteurs sociaux qui luttent contre le sida à l'occasion de la journée mondiale de lutte contre le sida, à Paris le 1er décembre 2011. (Photo Julien Mignot pour Libération)
Preuve d'un manque d'actions, tous les ans, 6 000 nouvelles contaminations surviennent.
Aquelques jours du Sidaction, qui se tient de vendredi à dimanche, les tout derniers chiffres sur le sida en France ont été publiés ce matin par l'Institut de veille sanitaire (INVS), avec surtout une analyse de l'évolution depuis dix ans (1). Bilan : ce n'est pas une catastrophe, mais ce n'est pas brillant, car l'épidémie reste terriblement stable depuis cinq ans : plus de 6 000 nouvelles contaminations surviennent chaque année. Ce qui souligne la pauvreté de l'action des pouvoirs publics sur le sujet, et surtout le manque de suivi : des plans pluriannuels sont élaborés, puis adoptés, avec parfois de justes recommandations, mais celles-ci ne sont pas mises en œuvre, à l'image du plan 2010-2014.
«Front». «Voilà une épidémie très particulière, plutôt bien contrôlée, sauf chez les gays, où la situation mériterait désormais une réponse bien plus adaptée. Tel est le visage qui commence à se figer en France sur le front du VIH», écrit l'Institut. Reprenons les chiffres : «Le nombre de découvertes de séropositivité, après avoir diminué significativement entre 2004 et 2008, s'est depuis stabilisé autour de 6 200 par an. Les laboratoires de ville ont été à l'origine de 33% des découvertes de séropositivité en 2012», notent les chercheurs. Parmi ces nouveaux cas, la proportion d'hommes continue d'augmenter, atteignant en 2012 69%, alors qu'elle était de 57% en 2003. Les 25-49 ans représentent 70% des découvertes de séropositivité en 2012, 18% sont des personnes âgées de plus de 50 ans et 12% ont moins de 25 ans. Enfin, plus de la moitié des personnes ayant découvert leur séropositivité en 2012 sont nées en France, 31% en Afrique subsaharienne.
Gruyère. Que déduire de ce demi statu quoi? C'est d'abord le maintien à un niveau élevé de la contamination chez les gays. Parallèlement, on assiste à un vieillissement de ceux qui se découvrent séropositifs, en particulier chez les plus de 50 ans, aussi bien gays qu'hétéros. Enfin, ces chiffres révèlent une politique de dépistage devenue sans souffle, et qui ressemble de plus en plus à un gruyère. Par exemple, alors que le dernier plan demandait un dépistage de la population adulte, celui-ci n'a toujours pas été appliqué, les médecins généralistes proposant toujours aussi peu le test.
(1) Bulletin épidémiologique hebdomadaire du, 1er avril 2014 : «Dépistage de l'infection par le VIH en France, 2003-2012»