Cinéma 4DX: des séances à sensations fortes
La Belle et la Bête, 15e minute: Maurice, le père de Belle, tente d'échapper aux loups dans une forêt touffue. Le siège du spectateur rythme la cadence de son cheval. On est ballotté au petit galop. L'étalon se cabre. Le siège aussi. C'est la tempête. De véritables éclairs frappent la salle, l'illuminant brièvement. La salle fait des vagues, et est parfois ponctuée de nuages de bruines. Une averse se déclenche et trempe Maurice, comme le spectateur, qui reçoit des gouttes d'eau en plein visage. Quelques instants auparavant, ce dernier pouvait ressentir des parfums de rose et le souffle du vent frais dans ses cheveux... Comme le fracas des épées (ou le sifflement des balles, c'est selon le film) par des injections de gaz comprimé derrière les oreilles. Au troisième rang, une dame renverse la moitié de son pop-corn dans un petit cri d'effroi.
Une expérience immersive, interactive, mais avant tout une projection de cinéma, c'est ce que propose le Pathé de la Villette, premier cinéma français doté d'une salle équipée de la technologie 4DX. Le but est clair: faire vivre chaque scène du film en éveillant non plus deux, mais quatre de nos sens. Pour ce, tout est mis en place: sièges amovibles (étonnamment virevoltants pour leurs 360kg), effets de lumière, vibrations, canons à air, pistolets à eau...
«Lessivé» mais «ravi»
À la fin de la séance, la majeure partie de la salle est «lessivée» - un spectateur au teint blême se tient l'estomac - mais «ravie». Pour un lundi après-midi, la population va de 7 à 77 ans: ados, parents accompagnant leurs enfants, retraités. Autant d'hommes que de femmes. Ouverte depuis le 15 mars, la salle ne désemplit pas. «On est bluffé! Il y a un taux de remplissage de 100% le soir», se félicite Arnaud Surel, directeur du Pathé La Villette, qui comptait au départ sur une fréquentation masculine et geek de 12 à 35 ans. «Impossible de dire si cela va se démocratiser ou non, mais les réalisateurs (Rupert Sanders et Luc Besson, notamment) sont de plus en plus fans. Je n'aime pas le terme “attraction”, car cette technologie reste au service du film, mais la 4DX propose bien plus qu'une projection classique. Le cinéma redevient une véritable sortie, à l'heure où les écrans sont partout, et individuels» continue-t-il.
Un authentique succès, décuplé par la curiosité des cinéphiles, tant la 4DX se révèle bluffante et efficace: le spectateur est littéralement plongé dans l'action. Les projections d'eau (qui semblent tomber du ciel, ce qui se révèle être le cas...) sont particulièrement réussies. Pour autant, la technologie est encore largement perfectible. Les coups donnés dans le dossier du siège, au départ surprenant, sont très vite lassants; et la synthése des odeurs, pas au point. D'autres effets, comme des tremblements incessants, ont tendance à forcer le trait du récit comme le ferait une bande-son trop présente. C'est un risque de la 4DX: que la forme prenne le dessus sur le fond.