Municipales : le FN crée la surprise
La formation de Marine Le Pen se présentait dans moins de 600 communes. Le FN a décroché Hénin-Beaumont et est en tête dans plusieurs autres villes.
Marine Le Pen - AFP
Marine Le Pen – qui n'avait pas ménagé sa peine pour aller soutenir, sur le terrain, les candidats de son parti – a dit voter ce dimanche avec « le sentiment du devoir accompli ». Quelques heures plus tard, elle pouvait arborer, sitôt connues les premières estimations, un sourire contenu mais ravi. « Il n'y a plus de bipolarisation, il va falloir s'y faire », a-t-elle prévenu. « Il se passe quelque chose », a-t-elle insisté, parlant d'un « cru exceptionnel » et d'un « immense élan d'espoir ».
Le Front national, qui misait sur les élections municipales pour enraciner et crédibiliser sa formation, a fait sensation. A l'issue du scrutin, il est assuré de voir le nombre de ses conseillers municipaux augmenter de manière substantielle (il n’en comptait que 59). Et semble même en mesure de décrocher plusieurs mairies. L'une d'elle est déjà tombée dans son escarcelle : Hénin-Beaumont, dans le Pas-de-Calais, symbole de la poussée du FN . Steeve Briois, le secrétaire général du parti, a recueilli 50,26 % des voix. Marine Le Pen figurait en avant-dernière position sur sa liste. Un nouveau coup de semonce pour le PS et l'UMP, quelques mois après la victoire du candidat FN à l'élection cantonale partielle de Brignoles, dans le Var.
Le Front national avait estimé entre 10 et 15 le nombre de villes « potentiellement gagnables ». Il aborde le second tour en position très favorable dans plusieurs autres villes. Robert Ménard est en tête à Béziers , dans l'Hérault. Comme Florian Philippot à Forbach (en Moselle), David Rachline à Fréjus (Var) ou le député Gilbert Collard à Saint-Gilles (Gard). En tête, le parti l'est aussi à Avignon ou Perpignan, où Louis Aliot a fait démentir les sondages : avec 33 % des voix, le compagnon de Marine Le Pen, vice-président du parti, dépasse le maire UMP sortant.
La formation politique fondée par Jean-Marie Le Pen il y a quatre décennies a profité de l'échec de la promesse de François Hollande d'inverser la courbe du chômage en 2013 et du climat délétère créé par les « affaires » qui secouent la droite. Le FN, qui avait présenté moins de 600 listes (un record, toutefois), peut se maintenir, et donc jouer les arbitres, dans un nombre important de communes. De Marseille à Saint-Etienne, en passant par Reims, Amiens, Tourcoing, Marignane, Agen ou Carmaux, la cité de Jean Jaurès dans le Tarn... « Probablement dans de 100 à 200 villes », pronostiquait-on ce dimanche au PS comme à l'UMP, le seuil de qualification ayant été abaissé à 10 % des suffrages exprimés. En 1995, l'année où il avait fait élire trois maires, à Toulon, Marignane et Orange, le FN avait imposé des triangulaires dans 138 villes, dont 17 villes de plus de 90.000 habitants. En 2008, il n'y avait que 12 triangulaires, dont 2 dans des villes de plus de 90.000 habitants.
Marine Le Pen a laissé aux électeurs frontistes leur « liberté de vote » au second tour, les appelant à « juger en fonction peut-être de considérations locales ». « Peut-être », mais pas seulement. Toute sa stratégie vise à poser le Front national comme la seule alternative à ce qu'elle appelle l'« UMPS ». La présidente du FN veut faire de ce succès aux municipales la preuve que son parti est un parti de gouvernement et un tremplin personnel pour les prochaines échéances électorales. « La vie politique ne se résume pas à faire gagner la droite ou à faire gagner la gauche. [...] Nous sommes une grande force politique », a-t-elle martelé sur les plateaux de télévision. Son père la voit déjà élue à la présidence de la République en 2017.